J'ai
participé aux aux
Assises
de l'École et de ses partenaires pour les valeurs de la République
dans
le cadre des réunions « infradépartementales »… C'est
ainsi que le représentant de l'Education Nationale les a nommées…
Première
impression… un échantillon de technocrates de l'éducation,
costume cravate, petit tailleur avec un soupçon « libertaire »
d'écharpe colorée… et tous ces gens se tiennent bien entre eux,
je te bise par ci, je te bise par là, on se tapote l'épaule… mais
on reste bien entre soi… Ensuite ce sont les discours, empreints de
suffisance, « moi qui sait, qui détient le pouvoir... »,
formules ampoulées mais surtout un vide sidéral… Rien sur le
fond, rien sur la réalité de l'école, sur l'engagement des
enseignant-e-s, sur le travail des associations… et pour cause. Ces
beaux messieurs et ces belles dames sont là pour nous mobiliser !
Eh oui, depuis bien des lustres, les enseignant-e-s, les associations
complémentaires de l'école publique se tournent les pouces,
enfilent des perles et se demandent bien ce qu'elles vont pouvoir
faire !!! Heureusement, la Ministre et ses
penseurs sont là pour NOUS MOBILISER !!!! Entre le discours du
représentant de l'Education Nationale (façon François Lenglet dans
le physique comme dans les propos…) et celui de la Sous-préfète,
le mot laïcité n'est pas prononcé… Mais nous sommes saufs, ils
vont NOUS MOBILISER vous dis-je…
Ensuite
vient l'apport de l'historien de service, un IPR
d'histoire-géographie qui nous apprend comment s'est construite la
République, l'école laïque, gratuite et obligatoire… bref tout
ce que, bien sûr, pauvres simples que nous sommes ne pouvions
connaître… Son propos est illustré par des citations extraites de
Télérama… C'est Vincent Delerm qui doit être content !!
Mais enfin, on entendra une fois le mot laïcité, c'est toujours ça.
Ensuite on passe aux ateliers, ils-elles ont choisi pour nous les
thèmes que nous allions discuter, ben oui, nous ne sommes sans doute
pas capables d'aborder les 11 questions de la Ministre ou de faire
nous même le choix… Donc trois thèmes, trois ateliers… Et, dans
chaque atelier ils-elles ont encore choisi trois questions… Pour
nous aider, bien sûr !!! Un temps, très court, je vous
rassure, j'ai pensé que nous devrions leur proposer des formations
sur l'animation de réunion, sur les outils coopératifs… Mais
c'est eux-elles qui savent et ils-elles sont là pour NOUS
MOBILISER !
Et
savez-vous ce qui arriva ? Chaque intervenant-e (enseignant-e,
responsable associatif, CPE) a dit ce qu'ils-elles faisaient dans
leur établissement, dans le cadre des partenariats avec les
associations… Oh, c'est sûr, rien de bien révolutionnaire, non
juste le quotidien des actions, le travail que chaque acteur de
l'éducation conduit sans relâche et surtout sans avoir attendu que
la Ministre est ses sbires NOUS MOBILISE. Et dans ce cadre on a
entendu parler de pédagogie, de sens, de valeurs, de travail
d'équipe, de projet…. A se demander si nos technocrates de service
sont sourds, aveugles ou ignorants… Avaient-ils besoin de cela pour
s'apercevoir que chaque jour, en France, dans les écoles, les
collèges, les lycées, dans les accueils périscolaires, les centres
de loisirs, les clubs sportifs des femmes et des hommes font vivre
les valeurs de la République ?…. Sans doute aurait-il fallu
aborder les causes de la crise… s'apercevoir
que le problème n'est pas celui de l'école mais celui d'une société
fondée sur le profit, la compétition (et donc l'exclusion), le
libéralisme...
Oh mais là c'est sale, c'est pas beau, c'est de la politique… Ils
étaient là pour NOUS MOBILISER !! Pas
pour réfléchir, pas pour écouter ce que nous savions du quotidien,
de la situation des jeunes et des familles,non, non, NOUS MOBILISER !
Bref,
j'ai perdu mon temps, d'autres avec moi, il n'en sortira pas
grand-chose car les vraies questions n'ont pas été posées :
la formation pédagogique initiale et continue des enseignant-e-s,
les effectifs dans les classes (une enseignante a osé affirmer
qu'ils-elles avaient des classes de 30 élèves…), le non
remplacement des enseignant-e-s absent-e-s, le temps pour travailler
en équipe, l’absence de moyens pour prévenir les décrochages,
l’absence de moyens (ou leur diminution) pour sortir de l'école,
du collège pour aller apprendre ailleurs, autrement, rencontrer
des femmes et des hommes différents, dans des paysages, des
environnements autres
que
celui des mômes…
Ceux-celles
qui savent ne sont pas les « cravatés », les « chères
madames » mais bien les femmes et les hommes qui tous
les jours, confronté-e-s aux souffrances, aux difficultés des
enfants et des jeunes, se retroussent les manches pour tenter
d'éduquer (educare : conduire hors, élever…)
les enfants et les jeunes qui leur sont confiés. Cela fait des
décennies que tous ces acteurs savent ce qu'ils-elles pourraient
faire si on les écoutait, si on se décidait à leur accorder les
moyens qu'ils-elles demandent… Qui est ce ON ? Ceux-celles que
nous avons élu-e-s, qui sont sensé-e-s gouverner pour chaque jour
apporter des solutions aux problèmes de notre société… Eh bien
dans le cas présent,
il ne s'est rien passé… Les
technocrates vont synthétiser… On va mettre ça dans la machine à
laver ministérielle et, je prends les paris qu'en dehors des
discours il n' y aura pas les moyens dont l'école publique a besoin.
Les 80 000 postes supprimés par Sarkozy ne seront pas rétablis
puisque ces technocrates qui se répandent sur les valeurs de la
République sont les mêmes qui, il y a 4-5 ans nous expliquaient, en
accord avec leur Ministre de l'époque, qu'il n'y a pas de lien entre
réussite scolaire et effectif dans les classes… La messe est
dite !
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